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Alexis Grimault : "Je m'adapte aux chevaux" | LETROT
Interview

Alexis Grimault : "Je m'adapte aux chevaux"

13/06/2025 - GRAND FORMAT - 24H au Trot
Le week-end dernier est le parfait exemple de ce qui se passe cette saison. Avec trois gagnants, Alexis Grimault a été l’entraîneur numéro un au monté. Or, le jeune professionnel mayennais, installé depuis 2018, est aussi le numéro un de sa profession depuis le début de l’année dans la spécialité de l’Étrier, aux victoires comme aux gains. À une dizaine de jours de la Journée des Champions avec ses trois finales de la compétition Étrier 3/4/5 où il aura de sérieux espoirs de succès avec Kalif Landia, déjà doublement titré à ce niveau, Alexis Grimault a répondu aux questions de 24H le Mag sur sa réussite et sur cette spécialité à laquelle il dit être très attaché.
Alexis Grimault Alexis Grimault - © J.-C. Briens
En complément, l'Entretien avec Alexis Grimault
Séance de travail sur la piste du Haras de Perroux - © J.-C. Briens Séance de travail sur la piste du Haras de Perroux - © J.-C. Briens

Double vainqueur de Groupes I, Kalif Landia doit donc être à vos yeux le symbole de votre travail avec les chevaux montés ?
Bien sûr ! Le jour du Prix de Vincennes, j’étais dans un état euphorique avec sa victoire devant la pouliche de Charley (Mottier) Kyrielle des Vaux (Rolling D'heripre). On vit pour ces courses-là ! La victoire de Kalif Landia (Un Charme Fou) dans le Prix Jag de Bellouet a aussi été un moment incroyable mais, dans le Prix de Vincennes, je n’arrivais pas à reprendre mes esprits. Il y a beaucoup de pression ces jours-là et en amont. Entraîneur, on travaille constamment avec la pression : le jour J, trois semaines avant, deux mois avant, etc. Il en y a toujours. Personnellement, je le ressens comme ça. Une fois le Prix des Centaures couru cet hiver, j’ai aussitôt basculé vers le Prix de Normandie. On quitte une course pour en attaquer une autre. Avec Kalif Landia, je me projette même plus loin. C’est un cheval avec lequel je veux courir le "Cornulier", deux fois, trois fois, etc. Il devra prouver qu’il en est capable, mais mon travail sera aussi très important pour parvenir à courir autant de "Cornulier" que je l’espère.

Comment définiriez-vous votre relation avec ce cheval ?
Il est le capitaine de l’équipe. On le regarde avec les yeux de l’amour, encore plus depuis qu’il fait la monte. C’est l’étalon de l’écurie. J’aimerais bien le voir évoluer plus à l’attelage mais, pour cela, il va falloir qu’il soit plus maniable qu’il ne l’est. Il a été dirigé au monté justement parce qu’il n’était pas très maniable attelé. Mais je l’ai couru monté un peu trop tôt à mon goût. Après ses débuts victorieux sous la selle, j’avais le choix de courir ou non le Prix de Vincennes qui venait. Bien m’en a pris de le courir. Du coup, il y a un lien fort entre Kalif Landia et moi, mais aussi entre son éleveur Roland Foucault et moi. Il m’a fait confiance dès que je me suis installé en 2018.


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Pouvez-vous nous raconter comment s’est faite la rencontre avec Roland Foucault ?
J’ai d’abord eu le premier poulain de Tina Landia (Instant Gédé), Hera Landia. Tout cela est grâce à Mathieu Mottier qui devait avoir ces poulains. Les deux premiers produits ne s’annonçant pas terrible, il n’a pas souhaité continuer. C’est comme cela que j’ai récupéré Hera Landia, trois fois placée de Groupe 1. Après deux ans d’installation, ça ne devrait pas exister d’avoir des chevaux de Groupe (sourire). Je ne peux que remercier Mathieu. On est très proches et je sais qu’il est ravi pour moi. Avoir de tels chevaux permet de passer des caps plus vite. Ce sont des risques à prendre mais on les a pris directement. On fonctionne comme ça, en prenant des risques et en saisissant des opportunités. Cela permet d’avoir encore des chevaux de Groupe et de faire moins d’erreurs. J’espère qu’a 40 ans, je serai meilleur et pas moins bon qu’aujourd’hui !

"Avec Kalif Landia, je me projette même plus loin. C’est un cheval avec lequel je veux courir le "Cornulier", deux fois, trois fois, etc. Il devra prouver qu’il en est capable, mais mon travail sera aussi très important pour parvenir à courir autant de "Cornulier" que je l’espère." Alexis Grimault
© J.-C. Briens © J.-C. Briens
"C’est le Haras de Perroux qui a gagné plus de 50 courses"
"Avec la perte des agréments de Charley (Mottier), mon effectif a doublé, comme le nombre de partants et la taille de l’équipe. C’est cela qui fait plus de 50 gagnants depuis le début de l'année. C’est pourquoi je ne parle pas au nom d’Alexis Grimault mais au nom du Haras de Perroux. C’est le Haras de Perroux qui a gagné plus de 50 courses et pas Alexis Grimault. Charley a été puni une fois pour une période de six mois en se voyant supprimer ses agréments par le Ministère et une seconde fois pour six mois encore pour la même raison. Je suis très attristé par cette situation. Depuis le début de notre installation, on gêne, soit par nos résultats, soit par nos prises de paroles. (...) Les réseaux sociaux font beaucoup de mal. Il n’y a aucun filtre. Avant, on se défendait au quart de tour sur des sujets sur lesquels on n’avait même pas à se défendre. Aujourd’hui, je ne suis plus sur X. Ce n’est pas nous qui faisons du mal à la filière mais les commentaires publiés. Je ne serai jamais gêné d’être contrôlé car cela fait partie de mon métier. Mais ce ne sont pas les commentaires que l’on peut lire ou les dénonciations de jaloux qui doivent être à l’origine des contrôles. Ça, ça me gêne beaucoup."

Le fait d'avoir des jockeys maisons compte aussi n’est-ce pas dans la réussite de l'écurie ?
Oui. On fait appel aux jockeys de la maison comme Alexandre (Bodin) et Lilian (Bertin) qui savent qu’ils sont à même de monter régulièrement, sans pouvoir non plus tout monter. Ils ont notre confiance et connaissent les chevaux par cœur, ce qui leur permet de performer aux courses. Cela fait partie aussi de la formation. Guillaume (Lenain) et Lilian sont arrivés à l’écurie sur le tard dans leur carrière d’apprenti et avaient déjà roulé leur bosse. Mais former un jeune au monté m’intéresse. Jean Ferron, après avoir travaillé chez Jean-Claude Hallais, a engrangé aussi de la confiance cette année et fait de moins en moins d’erreurs.

"Je ne serai jamais gêné d’être contrôlé car cela fait partie de mon métier." Alexis Grimault

Au niveau des origines pour les chevaux montés, comment pratiquez-vous ?
On se fait toujours une petite idée après le débourrage sur les capacités d’un cheval à réussir au monté suivant le père du poulain. Mais ce n’est pas quelque chose que je regarde de base. Je suis avant tout attentif au physique, aux allures et au fait qu’il soit endurant. Le papier vient après. Un Charme Fou fait de très bons chevaux montés, alors qu’il n’a lui-même jamais couru sous la selle.Du coup, je pense qu’il ne faut pas regarder. Au niveau des étalons, j’aime bien Singalo (Goetmals Wood) et Feeling Cash (Ready Cash), qui étaient très durs avec énormément de classe.


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Comment se présente la Journée des Champions 2025 pour votre écurie dans les Groupes I à l'Étrier ?
On devrait avoir trois partants dans ces Groupes et quatre au total. Pour cela, il faudra que Lakana de Fellière (Earl Simon) passe aux gains dans le Prix du Président de la République (N.D.L.R. : elle totalise 58.415 €) qui figure aussi au programme de Littlelou Matidy (Bird Parker). Ce sont deux juments qui se valent. J’étais très content de la course de "Lakana" dans le Groupe II. Son petit défaut est sûrement le haut de la montée où elle a un petit coup de mou avant de se relancer sur le plat. Je pense qu’elle va un peu pécher pour être dans les trois à ce niveau. Littlelou Matidy a fait la faute dans la montée sur un parcours de vitesse dernièrement. Elle a le niveau pour prendre une quatrième ou cinquième place.

Et Kalif Landia ?
Il a été très beau et très appliqué face aux "vieux", un peu moins beau et un peu moins appliqué dans le Groupe II suivant. Je pense qu’on l’a un peu monté à contre-courant ce jour-là. À la sortie de la volte, Kano (Uhlan Du Val) a une longueur d’avance sur lui à son extérieur. S’il avait continué dans sa progression, "Kalif" aurait pu prendre la tête et se faire recouvrir par Kano. Même si cela a été une course sans train, il y aurait eu moyen de prendre beaucoup plus d’initiatives dans le parcours. Là, en le reprenant en partant, on s’est retrouvé emboucané et on a subi toute la course avant sa faute dans le dernier tournant. C’est une course à effacer. Cela a été une déception. J’ai sûrement donné de mauvaises consignes. J’ai trois semaines pour travailler là-dessus, ce qui est suffisant. Le matin, comme en course d’ailleurs, il est très généreux et travaille attelé. Il sera simplement monté à la promenade dans le calme avant l’échéance. Il va courir pour gagner dans le Prix de Normandie.

Jalendra de Malac : la jument d’attaque
Jalendra de Malac (Singalo) est à la tête d'une série de sept succès consécutifs, ce qui en fait dans ce domaine l'égale de Liberté de Choisel (Captain Sparrow) juste derrière Inexess Bleu (Vittel De Brevol) et ses neuf succès. "Remporter sept courses à la suite est une série rare, insiste son entraîneur. Je pense que sa dernière course à Châtelaillon-La Rochelle est l’une de ses meilleures depuis qu’elle est arrivée à la maison avec celle à Vincennes où elle avait voyagé en troisième épaisseur." À force de gagner, la pression est de plus en plus élevée. "On n’a pas envie de perdre maintenant, concède Alexis Grimault alors que la jument sera au départ du Prix Jean-Yves Lecuyer-Prix de Grasse (Groupe 3) lors de la Journée des Champions. Il y a de la pression." Mais au fait comment cette jument a intégré son effectif ? Parole au recruteur : "Je l’avais repérée, d’abord parce que je la trouvais très belle physiquement, avec ce côté Singalo que j’adore, un cheval monté, qui fait de bons chevaux à l’attelé. Je l’avais remarquée à Cherbourg quand elle courait ferrée et n’avait pas eu toutes ses aises pour finir. J’en ai parlé à Arnaud Gougeon et on s’est entendus pour qu’elle rejoigne l’écurie. C’est comme un entraîneur de foot qui recrute un jeune joueur pour son équipe. J’avais vraiment envie que cette jument rejoigne mon équipe avant l’hiver. Je voulais compléter mon effectif avec une bonne jument d’attaque comme elle. Elle est capable de tout faire au niveau qui est le sien actuellement. En revanche, si elle monte les paliers, il faudra sûrement adapter la tactique".

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