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Toujours plus, la tendance 2023 du marché des yearlings | LETROT
Retour sur les ventes de yearlings

Toujours plus, la tendance 2023 du marché des yearlings

05/09/2023 - GRAND FORMAT - 24H au Trot

La première phase de ventes de yearlings vient de se clôturer. Trois offres différentes, sur cinq jours, ont permis à 427 lots de changer de propriétaire(s) (données valables au 4 septembre). La place de Caen va prendre le relais la semaine prochaine avec, au surplus, une offre d’une petite trentaine de lots incluse dans la vente mixte de septembre d’Arqana Trot du 19 septembre. Il est l’heure de prendre un peu de champ, d’élargir la focale pour sérier les caractéristiques, si elles existent, de 2023.

© Province Courses / Pauline Lefaucheux © Province Courses / Pauline Lefaucheux
© Province Courses / Pauline Lefaucheux © Province Courses / Pauline Lefaucheux

Toujours plus de prix élevés dans la partie de sélection
Avec 20 lots à 100.000 € et plus sur le seul marché deauvillais, on obtient là encore un nouveau record. C’est plus que les 18 du précédent exercice de référence, en 2018. Cette année-là, HUNTER VALLEY (Charly du Noyer) avait établi le record de l’époque à 400.000 € mais 17 autres lots avaient aussi affiché au moins 100.000 €.
Si l’on ajoute les cinq autres yearlings vendus chez Auctav pour un montant à six chiffres en euros, dont bien sûr le recordhorse Machiavel Bourbon à 580.000 €, ce sont 25 lots qui ont atteint ou dépassé le seuil des 100.000 € cette année. Toujours plus.

Le Repository de plus en plus présent

C’est l’élément de décor qui s’impose le plus dans le paysage : le repository (dépôt et mise à disposition d’un ensemble de données – clichés, radios, scopes, compte rendu de visite vétérinaire). L’objectif est de mettre à la connaissance des potentiels acheteurs, de manière transparente, des données liées au médical et à la morphologie. L’accès à ces données est encadré au regard de la confidentialité du domaine médical. Légalement, le repository ne peut être imposé aux vendeurs mais seulement vivement conseillé.
Les données sur la généralisation de la pratique sur le marché de sélection sont explicites :

Arqana Trot
▪️ 328 dossiers sur 503 en 2023 (contre 290 dossiers sur 534 en 2022 soit +13 % malgré moins de lots présentés).
▪️ pour la journée 1 (la plus sélective) : 144 dossiers sur 155 lots pour 2023 (92,9 %) contre 105 dossiers pour 122 lots en 2022 (86,1 %), soit +12,8 % en nombre et +7 points en pourcentage entre 2022 et 2023.
Composition du repository d'Arqana Trot pour les yearlings : 24 clichés Radio sur la plateforme (vidéo endoscopique optionnelle)

Auctav
▪️ 100 % des yearlings avec un dossier vétérinaire comprenant un certificat formalisé par l'agence de vente qui passe en revue des points imposés (les yeux, la bouche, le cœur, les testicules, etc.). Arnaud Angéliaume explique : "Nous imposons ce certificat vétérinaire qui checke des points très importants qui ne sont pas inclus dans la formule repository classique. Ce dossier compile aussi les vaccinations et les résultats d’analyses pour certains profils. Nous préconisons aussi aux vendeurs de faire des radios et des scopes. Nous proposons le nombre de clichés le plus juste sans forcément les multiplier sans raison. À mon sens, les radios et un scope sont insuffisants si on n’a pas une vision clinique d’ensemble d’un cheval. C’est comme aller chez un spécialiste sans qu’un généraliste n’ait fait un bilan complet et ne détecte le domaine à approfondir par le spécialiste."

Sur le sujet du repository, Marie Tourainne (haras d’Ecouché, n°1 des vendeurs) nous a déclaré : "Nous avons toujours souscrit au repository et présentons tous nos yearlings du jour 1 d’Arqana Trot avec repository depuis plusieurs années. Cela clarifie bien des choses et garantit la transparence. Je n’appréhende d’ailleurs pas le lundi qui suit les ventes sur le sujet du retour d’un yearling que nous avons vendu. Tout est fait en connaissance de cause pour les acheteurs."

Toujours plus d’exigences vétérinaires
La logique de la transparence a aussi son revers de la médaille avec le poids des vétérinaires de plus en plus déterminant dans les décisions d’achat. Des vendeurs, comme des acheteurs, nous ont par ailleurs souligné que les lignes de conduite des vétérinaires ne sont pas les mêmes, d’un praticien à un autre, certain prônant la politique de l’ultra-prudence systématique alors que d’autres proposent des analyses plus circonstanciées, mettant en avant un risque faible ou mineur pour le bon déroulement d’une carrière sportive.

© Province Courses / Pauline Lefaucheux © Province Courses / Pauline Lefaucheux

 

Toujours les étalons du haut des classements
Les étalons du haut dominent. Les deux sires qui ont fonctionné ces dernières saisons en mode tarif privé (private), READY CASH (Indy de Vive) et son fils FACE TIME BOURBON (Ready Cash) ont été les stars des sessions de sélection. Ready Cash place quatre de ses produits dans le top-10 (toutes places de ventes confondues) et Face Time Bourbon trois. Les trois lots restants sont à chaque fois reliés à une mère d’exception. Machiavel Bourbon, le top général à 580.000 €, est le frère de Face Time Bourbon, par PRODIGIOUS. Mellow Speed, vendu 200.000 € chez Auctav, est le frère par GALIUS de la classique IDYLLE SPEED (Carat Williams). Quant à Mana Mix, qui a fait afficher 185.000 € chez Arqana Trot, elle est la fille de la gagnante de Groupe 1 ANNA MIX (Ludo de Castelle).

Données Ready Cash
12 produits vendus | total : 1.733.000 € | prix moyen : 144.417 €
▪️ Les plus chers : 250.000 € (Meursault chez Arqana Trot et Mardonios chez Auctav)
▪️ Le moins cher : 21.000 € (Mayakoba chez Arqana Trot)

Données Face Time Bourbon
17 produits vendus | total : 1.921.000 € | prix moyen : 113.000 €
▪️ Le plus cher : 240.000 € (Magic Bourbon chez Arqana Trot)
▪️ Le moins cher : 50.000 € (Mister Suprême chez Arqana Trot)

Incontestablement, 2023 a marqué le passage de témoin, sur les rings de ventes, entre le père Ready Cash, récemment disparu, et le fils Face Time Bourbon.

Le poids des associations
Ce n’est pas nouveau mais le concept des associations semble désormais incontournable dès lors qu’on parle des prix élevés. En 2023, c’est toujours plus d’associations d’acheteurs. Chez Auctav, Machiavel Bourbon à 580.000 € a été acheté par Florent Fonteyne (Trotting Bloodstock) pour une association. Idem chez Arqana Trot pour les achats orchestrés dans une logique pandisciplinaire trot/galop par Thomas Bernereau. Météore de Joudes (200.000 €) est destiné à une association intégrant Alain Jathière, représenté à Deauville par Nicolas de Watrigant (Mandore Agency). Le propriétaire très en vue au galop est aussi actif au trot. Et la famille Bernereau mais aussi Jean-Pierre Micholet – des figures du trot donc – complètent le montage en copropriété. On est bien là dans le développement du choix de l’association qui fait florès an Australie notamment, comme nous l’avait présenté Jean-Etienne Dubois récemment (lire notre édition du 29 août) : "Là-bas, c’est un cheval pour dix ou vingt propriétaires et non un propriétaire avec dix chevaux."

L’exception Philippe Allaire
Toute règle appelle son exception. On parle du poids des associations et c’est un investisseur seul, ou du moins avec sa femme Gitte, qui a signé les deux bons les plus importants des trois jours d’Arqana Trot. Philippe Allaire est bien l’investisseur exceptionnel par excellence, intervenant au gré de motivations très personnelles. Il a acheté Meursault (Ready Cash) 250.000 € dans un acte de remerciement au crack devenu étalon or. "Ready Cash m’a tellement apporté que cela ne servirait à rien de l’avoir eu dans ses boxes si je ne défends pas un de ses fils qui me plaît. Et ce poulain me plaisait !" a-t-il expliqué. Quant à ses 240.000 € déboursés pour Magic Bourbon (Face Time Bourbon), ils se justifient par sa volonté de récupérer absolument une fille d’ URGENTISSIME qu’il avait entraînée. Et ce, quel que soit le prix.

Le vendeur/éleveur qui demeure copropriétaire
Là encore, ce constat n’est pas nouveau mais semble en voie de généralisation. La présence des éleveurs/vendeurs dans le tour de table des associations d’acheteurs est souvent citée comme un élément de facilitation de la vente. Rainer Engelke, l’éleveur, se retrouve dans la nouvelle association qui se partage Machiavel Bourbon. Cette pratique, qui intervient dans les segments les plus élevés du marché contraint naturellement à relativiser certains chiffres. En fonction du niveau de maintien de l’éleveur dans le tour de table des propriétaires, le prix réel facial de la vente se trouve biaisé puisqu’il ne renvoie pas à la réalité commerciale.

Des pouliches qui ont de la tenue
Avec huit pouliches dans le créneau des 25 lots à 100.000 € et plus, l’édition 2023 est plutôt à leur avantage. Elles étaient cinq l’an dernier à Arqana Trot (en l’absence d’une présence d’Auctav) dans le top-16 à 100.000 € et plus avec deux tops féminines à 135.000 € (Louisiane de Bomo et Little Perrine). Cette année, elles sont quatre à 135.000 € et plus : Magic Bourbon (Face Time Bourbon – 240.000 €), Mana Mix (Hohneck – 185.000 €), Guardami (Tactical Landing – 155.000 €) et Magie des Molles (Face Time Bourbon – 135.000 €). Le choix de pouliches à fort potentiel génétique pour l’élevage et à haute valeur résiduelle est donc toujours d’actualité.

Des acteurs étrangers actifs
Les Suédois ont fait leurs emplettes sur le marché français. Björn Goop a acheté trois lots à Arqana Trot dont Mauricien (Love You) à 70.000 €. Jörgen Westholm a fait de même à des tarifs compris entre 36.000 € et 19.000 €. Mais c’est la Stall Courant d’Anders Ström qui a été la locomotive scandinave avec cinq achats pour un total de 447.000 €.
Parmi les autres acheteurs nordistes, citons encore Balzac Trav AB, Christoffer Eriksson (2 lots). Chez les Italiens, Gaetano Pezone s’est montré très actif. Il a obtenu 12 lots (2 chez Auctav et 10 chez Arqana Trot) pour un global de 719.000 €. Une partie de la clientèle du courtier transalpin est française et certains lots resteront donc en France. Au sein du groupe des investisseurs belges, Yann Desmet a répondu présent avec six achats répertoriés à son nom pour 136.000 €. Globalement, le caractère international de la séquence de ventes françaises a bien été respecté.

Hooker Berry, le jeune étalon qui a du succès
Parmi les quatre étalons de première production rattachés à la promotion née en 2017 (les "H"), c'est HOOKER BERRY (Booster Winner) qui affiche le meilleur coefficient multiplicateur entre le prix de vente moyen et le prix de saillie affiché en 2021. Avec un coefficient de 7,7, le vainqueur du Prix d'Amérique 2023 fait sensiblement mieux que HOHNECK (Royal Dream), le lauréat de l'Elitloppet, à 4,5.

▪️ Hooker Berry : 8 vendus | Total : 215.000 € | prix moyen : 26.875 €
➤ Coefficient multiplicateur (saillie 2021 à 3.500 €) : 7,7
▪️ Hohneck : 16 vendus | Total : 654.000 € | prix moyen : 40.875 €
➤ Coefficient multiplicateur (saillie 2021 à 9.000 €) : 4,5
▪️ HELGAFELL : 11 vendus | Total : 312.000 € | prix moyen : 28.364 €
➤ Coefficient multiplicateur (saillie 2021 à 10.000 €) : 2,8
▪️ HEAVEN'S PRIDE : 2 vendus | Total : 13.400 € | prix moyen : 6.700 €
➤ Coefficient multiplicateur (saillie 2021 à 3.500 €) : 1,9

Galius, des produits qui lui font honneur
Le regretté Galius (Love You) voyait la première de ses deux promotions sur le ring. Porté par les 200.000 € réalisés par son fils Mellow Speed chez Auctav, il affiche un prix moyen de 47.071 € pour 7 produits vendus. Avec un ratio prix moyen de vente/prix de saillie 2021 de presque 12, il fait partie des plus belles opérations du marché des yearlings 2023.
▪️ Galius : 7 vendus | Total : 329.500 € | prix moyen : 47.071 €
➤ Coefficient multiplicateur (saillie 2021 à 4.000 €) : 11,8

 


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