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Jérémy Van Eeckhaute, le rebond d'un enfant de la balle | LETROT
La belle histoire avant le Prix de Vincennes

Jérémy Van Eeckhaute, le rebond d'un enfant de la balle

15/12/2023 - GRAND FORMAT - 24H au Trot

Son nom est ancré dans les programmes des courses au trot depuis quatre décennies. Van Eeckhaute. Et apparaît au palmarès de quelques fleurons des courses nationales avec des pages écrites par Grâce Ducal et Lazio du Bourg. Des honneurs au crédit de Jöel Van Eeckhaute. Mais depuis longtemps déjà, la transmission s’est réalisée au crédit du fils Jérémy, dit Gaston (son deuxième prénom) pour la plupart du monde des courses. Une perpétuation du nom Van Eeckhaute qui était en souffrance ces dernières années. La faute à des résultats en baisse et l’absence de bons chevaux. Avec Kapaula de l’Epine, la nouvelle perle de Gaston et probable favorite du Prix de Vincennes (Gr.1), on ne parle pas d’un simple retour au premier plan mais plutôt d’une résurrection salvatrice pour le professionnel trentenaire.

Jeremy Van Eeckhaute © ScoopDyga - Jérémy Van Eeckhaute
Jeremy Van Eeckhaute Déjà à cheval ! - © Jérémy Van Eeckhaute

Avec sa sœur cadette Lucie, Jérémy Van Eeckhaute a été mis très tôt à cheval. Les photos en attestent, témoins aussi d’une autre époque.

Le palmarès de Groupes 1 de Joël Van Eeckhaute
→ 3 victoires de Groupe 1
Grâce Ducal : Prix de Normandie (Gr.1) 1999 | Prix de l’Île-de-France (Gr.2 à l’époque) 2001
Lazio du Bourg : Critérium des 3 Ans (Gr.1) 2002, Prix de Normandie (Gr.1) 2004


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Parlez-nous de vos débuts comme entraîneur.
JVE.- Je me suis installé jeune, à 23 ans, en 2009. J’avais ma propre structure financière mais travaillais sur le même site que mon père. Je voulais faire et faisais mes propres choix. Avec mon père, cela s’est toujours bien passé, dans la compréhension et le respect mutuel.

Quel bilan de votre début d’activité ?
JVE.- Tout a bien commencé car, avec ma première génération de poulains, je suis tombé sur TARTINE A THEO (NICE LOVE – 193.080 € de gains en fin de carrière) et TOY DES SARTS (JARDY – 248.600 € de gains). Ils ont très bien marché. Tartine à Théo a performé au niveau Quinté+ et Toy des Sarts a dû gagner huit courses à Vincennes au monté. Avec le recul, cela paraît simple. Ensuite, j’ai eu plusieurs générations creuses avant de tomber sur BARON DU BOURG (LILIUM MADRIK – 475.217 €), le cheval qui a marqué mon début de carrière. C’est mon cheval de cœur. Il m’a permis de gagner dans le GNT, de participer au Tour Européen (du Trotteur Français), a conclu cinquième du Prix du Président de la République. Il a fait une belle carrière et a duré dans le temps. Ensuite, j’ai eu CREATION (RIEUSSEC – 227.140 €) et DIVA BEAUREGARD (OTELLO PIERJI – 203.260 €).

Et ensuite, à partir du début des années 2020, votre nom s’est fait plus discret.
JVE.- Je dirais que je suis entré dans un trou noir. Je n’ai pas eu de chevaux qui ont fait les carrières espérées. La réalité m’a rattrapé en quelque sorte. En plus, mon effectif était composé aux trois-quarts par des chevaux qui m’appartenaient ou étaient en location. La trésorerie a été compliquée à gérer. Il faut bien sûr essayer des poulains pour le renouvellement. Quand on ne vous en propose pas en pension, il faut en louer. À Grosbois, je n’ai pas une place énorme et n’ai plus la possibilité de recourir à l’établissement de mon père à la campagne depuis qu’il l’a vendu. Il me faut donc payer des pensions ailleurs. Il y a eu aussi la période Covid. Cela a duré. J’ai fait un très mauvais hiver l’an dernier avec pratiquement tout mon effectif malade. C’était la catastrophe. J’ai heureusement eu le soutien de l’Ecurie du Cojeul de M.Guyon (Gérard Guyon) qui m’a aidé financièrement pour que je tienne. C’est vrai aussi que quand tu cours après l’argent, tu fais des mauvais choix avec tes chevaux en leur en demandant trop, en faisant trop de déplacements. Jusqu’à ce que Kapaula de l'Epine ne me sorte la tête de l’eau, j’ai fait de la route pour payer les factures. Heureusement, la passion était toujours là et je me suis accroché. Il y a eu aussi des résultats en 2023 qui ont compté. JEEP DU PONT (VIVALDO BELLO) a pris des places, ISLA MUJERES (ULYSSE) a gagné.

Kapaula de l'Epine prépare le Prix de Vincennes !
Jeremy Van Eeckhaute Avec sa soeur Lucie sur une dresseuse - © Jérémy Van Eeckhaute

L’histoire de Kapaula de l’Epine

24h au Trot.- Racontez-nous l'histoire de Kapaula de l'Epine, depuis son tout début.
Jérémy Van Eeckhaute.- Kapaula est arrivée chez moi débourrée. Sa propriétaire (Christine Sanchez) l’avait achetée 1.500 € à Caen [retrouvez l’analyse de son pedigree dans notre édition du 1er décembre]. Après son débourrage, elle est arrivée chez Sandrine Buga pour qui j’avais en la charge de CAB CALLOWAY (LOVE YOU – 101.530 €) qui avait bien performé. Sandrine Buga m’a contacté en me disant qu’elle avait la jument d’une amie à me proposer. Kapaula de l’Epine a tout de suite montré de la qualité et des dispositions mais elle nous a causé bien des problèmes. À un moment, j’ai douté. Je me suis dit qu’on n’allait pas y arriver. Elle a toujours eu des capacités hors normes mais son gros souci était, quand elle était pouliche, de ne pas partir. Gaby (Gabriele Gelormini) qui l’avait drivée deux fois m’avait dit : "C’est une top jument mais elle ne veut pas partir". On a insisté avec elle et, avec le recul, on voit qu'elle n’a jamais eu de vacances...


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Comment l’avez-vous finalement déclenchée ?
JVE.- En février, Yoann Lebourgeois l’a travaillé cinq ou six fois à l’attelé à Grosbois à ne faire que des départs et c’est avec lui qu’elle s’est mise dans le bon sens. Je peux dire que c’est grâce à lui qu’elle en est là où elle est aujourd’hui. Il a gagné en avril avec elle à Vincennes à l’attelé. Ensuite, on était en désaccord sur le choix des ferrures. Il ne lui est plus associé depuis mais, de toute façon, il a arrêté sa carrière de jockey. Je lui suis évidemment reconnaissant car c’est lui qui a déclenché le véritable départ de la jument. Je suis persuadé qu’un jour elle fera des grands trucs à l’attelage car elle a des capacités énormes. Au monté, elle a tout de suite montré de belles dispositions. Elle a vite pris des places avec Mathieu (Mottier) mais souvent en se dépensant un peu trop. Elle est maintenant sur de bons rails mais reste délicate. Quand on regarde ses courses, on n’est pas sereins. Il faut que tout se passe bien, qu’elle soit isolée en partant et libérée.

Qu’est ce qui a changé avec Kapaula ? Comment est-elle aujourd’hui ?
JVE.- Elle est de mieux en mieux au travail et en courses. Elle se gère mieux. Il faut vraiment l’isoler au départ pour qu’elle ne se mette pas en route immédiatement. La jument est en forme et la génération des "K" montés n’est peut-être pas folle. Elle vient de gagner les deux dernières épreuves préparatoires et sera sans doute favorite dans le Groupe 1. C’est de la bonne pression évidemment après avoir galéré. J’aurai du stress mais serai plus détendu que les fois précédentes. Ces succès permettent aussi de mettre tout le travail de l’écurie en valeur. Eva (Bouclet) est pour beaucoup dans la réussite de la pouliche. C’est elle qui la monte tout le temps. Kapaula est devenue super gentille au quotidien. Il faut juste qu’elle ne se tende pas. Depuis deux ou trois mois, elle sait ce qu’elle doit faire et est plus calme, gérable et agréable.

Mathieu Mottieu, en premier pilote
Sachant Eric Raffin engagé sur KAYA DREAM dans le Prix de Vincennes, le jockey n°1 de Kapaula de l’Epine est Mathieu Mottier. Il a fallu néanmoins attendre pour Jérémy Van Eeckhaute la décision de l’entourage de Kyt Kat (finalement retiré des partants), la première monte initiale de Mathieu Mottier, pour avoir la confirmation de recréer le couple Kapaula de l’Epine et Mathieu Mottier. "Avec Matthieu, cela s’est toujours bien passé", confie l’entraîneur.

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