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Laurent Broomhead, la pyramide des émotions | LETROT
Rencontre

Laurent Broomhead, la pyramide des émotions

02/05/2025 - GRAND FORMAT - 24H au Trot
Les hippodromes, Laurent Broomhead les fréquente depuis son enfance, lui le petit-fils d’un lad de Maisons-Laffitte et le fils d’un père turfiste qui emmenait sa famille aux courses jusqu’en vacances. Pour celui qui a fait sa carrière à la télévision et a animé pendant huit ans La Matinale d’Equidia, le cheval est un ancrage auquel il finit toujours par revenir. Après une parenthèse de quelques années, il vient ainsi de remporter son premier Groupe avec Mat Manathis, entraîné par Alexis Prat, alors que sa pouliche pur-sang, la bien nommée Pyramide, référence au célèbre jeu télé qu’il a longtemps animé, est au départ d’une Classe 2 dimanche. Que ce soit à Vincennes ou à ParisLongchamp, Laurent Broomhead est avant tout en quête des émotions propres aux courses qu’il puise aussi dans les relations humaines, indissociables à sa vision du propriétariat.
Laurent Broomhead Laurent Broomhead à Vincennes - ©Scoopdyga
Laurent Broomhead avec la famille Prat et Benjamin Rochard - ©Scoopdyga Laurent Broomhead avec la famille Prat et Benjamin Rochard - ©Scoopdyga

Par l'intermédiaire du fils, devenu des années plus tard le pilote au palmarès exceptionnel que l'on connaît et auquel a été décerné l'an dernier l'Eclipse Adward du meilleur jockey aux États-Unis, Laurent Broomhead va faire la rencontre du père, Frédéric, et plus encore de la famille Prat. "Un jour, j'ai fait part à Frédéric de mon envie d’avoir un trotteur car c’était l’un des rêves de ma vie, confie-t-il. Plusieurs mois après, le jour du Prix de Diane je me souviens, il m’a dit que peut-être que si je voulais, on pourrait voir aux prochaines ventes. C’est comme cela que l’on a acheté notre premier cheval en commun." Ugolini est celui-ci et sera suivi quelques années plus tard par Canari Match. Acheté 5.000 € à Caen, il fait partie des meilleurs éléments de sa promotion dès l'âge de 2 ans et termine à la deuxième place du Critérium des Jeunes (Gr.I).

Confiance et différences

Entre le propriétaire et l'entraîneur va se tisser un lien "de transparence, de confiance et de respect" que le premier juge "indispensable" dans la relation telle qu'il la conçoit. "Ce sont des liens très proches et, en même temps, on vient de mondes différents, souligne Laurent Broomhead. On a d'ailleurs des caractères très différents. Mais c’est justement ce qui est intéressant, de découvrir des personnages qui ne sont pas de votre monde. Cela ne nous empêche pas de bien nous entendre, de partager des moments formidables comme la victoire de "Mat"."

"Dans les courses, il y a beaucoup de monde égoïste, ce qui n’est pas forcément un défaut. Et puis, il y en a pour qui le partage est important. C’est le cas de Tony Clout et de la famille Prat".

Car, comme toujours et quel que soit le milieu, l'ancien animateur place les relations humaines au cœur de ses préoccupations. "Dans les courses, il y a beaucoup de monde égoïste, ce qui n’est pas forcément un défaut, constate-t-il. Et puis, il y en a pour qui le partage est important. C’est le cas de Tony Clout et de la famille Prat. Il faut une capacité à accepter que l’on a que tant de pourcentage du cheval, accepter de partager les gains avec des gens très différents. Il faut être content du dîner que l’on peut faire ensemble, de la bouteille de champagne que l’on peut déboucher. Pour moi, c’est important." D'autant qu'il possède ses chevaux toujours en association. Dans le cas de Mat Manathis, il est associé avec les Prat père et fils.


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Laurent Broomhead, qui n'est pas peu fier que, pour sa première course, Flavien Prat portait sa casaque, a tout de suite été séduit par l'idée que Mat Manathis soit entraîné par Alexis, le cadet de Flavien, après son achat à Caen. "C’est formidable de participer au début de carrière d’un entraîneur. Je ferai partie de ceux qui étaient là au début", se réjouit-il.

"C’est formidable de participer au début de carrière d’un entraîneur. Je ferai partie de ceux qui étaient là au début".


Ce nouvel épisode de sa carrière de propriétaire intervient après que Laurent Broomhead a ressenti le besoin de prendre du recul.

Alexis Prat : "Ça devait finir par nous sourire"
En remportant le Prix Atlas, Mat Manathis a ouvert son palmarès dans les épreuves de Groupe en même temps qu’il remportait sa première course. "Il n’avait encore jamais gagné tout en courant à ce niveau depuis le début quasiment. Ça devait finir par nous sourire", estime Alexis Prat, l’entraîneur du fils de Booster Winner, dont le travail est salué par Laurent Broomhead. "Cette victoire est la confirmation de sa course précédente quand il était devancé par Guglielmo Jet, un poulain italien. Même s’il était battu ce jour-là, le style m’avait plu. Il faisait un bon dernier kilomètre face à un très bon cheval." Ces performances interviennent dans l’évolution du poulain élevé par les époux Coulon en Mayenne. "Il a évolué physiquement au fur et à mesure des courses. Quand je regarde des photos de lui poulain, il était vraiment léger. Plus ça va dans le temps, plus il s’étoffe. C’est tellement dur de gagner à ce niveau que c’est plus facile de ne pas y arriver que d’y arriver. Je suis très fier du cheval. Il faut savourer une telle victoire", se réjouit le trentenaire. Tout comme il apprécie sa relation avec Laurent Broomhead : "Il a des chevaux depuis longtemps, galopeurs et trotteurs. Aujourd’hui, il a un cheval de Groupe, mais il sait bien que pour en arriver là, il faut être passé par bien des étapes. Il est présent et se tient informé, mais il reste en retrait".

 

©Scoopdyga ©Scoopdyga

Un retrait nécessaire pour mieux revenir

"Il y a sept ans, j’ai vécu le décès d'une personne très proche, partage-t-il avec pudeur. En même temps que j’ai pris ma retraite et arrêté Equidia, j’ai pris la décision de ne plus avoir de chevaux. Il me fallait changer de vie. J’avais fait un peu le tour et j’avais envie de sortir de ce monde." Pendant cette période, Laurent Broomhead confie que les chevaux ne lui ont pas manqué et qu'il n'avait pas l’intention d'en reprendre. Mais un coup de fil de Tony Clout va le faire changer d'avis. "Il venait de prendre sa retraite d’entraîneur et souhaitait reprendre un ou deux chevaux. Il voulait savoir si cela m’intéressait." La réponse est positive et, en 2022, sa casaque est de retour sur les hippodromes de galop.

L'année suivante, c'est un autre appel qui va lui remettre un pied à l'étrier au trot comme il le rapporte : "Le hasard fait bien les choses. Un jour, je vois un portrait d'Alexis (Prat) dans "Le Parisien". Je fais une copie que j’envoie au père et au fils. Frédéric m’appelle aussitôt pour me dire qu’il va aux ventes de Caen l’après-midi même. Je vous jure que c’est vrai ! La vie n’est faite que de hasards, après il faut les provoquer. Il me demande si je veux reprendre une part et je lui réponds : "Oui bien sûr, vous n’avez pas compris peut-être..." Le soir, il m’appelle pour me dire qu’il avait acheté deux yearlings et me proposait d’en prendre une part. Parmi les deux, il y avait Mat Manathis".


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Avec ce poulain, bien qu'il n'a pas fait aussi bien que son prédécesseur Canari Match sous la casaque bleue et blanche dans le Critérium des Jeunes - "le réglage que j’ai voulu s’est transformé en dé-réglage. J’ai fait n’importe quoi. La paire d’œillères descendantes n’a pas apporté ce que j’en espérais. Aujourd’hui, il a un petit quart d’œillères et il est très bien ainsi", précise Alexis Prat -, Laurent Broomhead estime que Mat Manathis lui est supérieur : "Je crois que c’est aussi ce que pensent Alexis et Frédéric".

La recommandation de Flavien Prat depuis les États-Unis

Grand admirateur et supporter de Flavien Prat dont il essaye le plus possible de suivre les exploits aux États-Unis (il sera dans la nuit de samedi à dimanche au départ du légendaire Kentucky Derby), Laurent Broomhead bénéficie aussi indirectement de ses conseils. Comment ? C'est Alexis Prat qui nous rapporte cette anecdote allant dans le sens de l'analyse de son propriétaire qui met en avant l'extrême technicité de la discipline : "Sachant qu’Éric Raffin ne pouvait pas driver le poulain la dernière fois car il était en vacances, je ne savais pas ce que je devais faire comme choix de pilote, si ce n’est que je voulais un driver qui puisse continuer à le driver après cette course. Comme il a tendance sous l’effort à pencher sur les concurrents à son intérieur, Flavien avec qui j’en ai discuté m’a conseillé de faire appel à un driver gaucher. C’est la raison pour laquelle mon choix s’est porté sur Benjamin Rochard, pilote en grande forme qui plus est".
Une victoire est toujours la somme de détails. On devrait donc retrouver le driver angevin au sulky de Mat Manathis lors des prochains semi-classiques.

 


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